Le travail
c'est la santé ( H.Salvador)
Trois jours de pétole et l’absence d’activité physique crée déjà des troubles psychologiques .
Pas encore les hallucinations d’un paradis artificiel qu’aurait causé la consommation de quelques substances psychotropes (pourtant assez facilement accessibles aux Antilles !).
Non, juste une subite inclination à donner un sens à l’agitation de nos cellules, aussi bien musculaires que neuronales que l’on nomme communément « travail ».
Je sais, vous allez dire que les propriétaires de bateau comme le mien sont majoritairement retirés de la vie professionnelle.
Ce n’est pas le résultat d’une minutieuse enquête sociologique, c’est une tautologie sur laquelle il est inutile de revenir.
Nous allons tenter néanmoins, à la faveur de la fraîcheur matinale, et désœuvré par la faute d’abondantes précipitations pluvieuses, d’éclairer modestement le sujet.
A défaut d’édification des masses, qui ne liront jamais ces élucubrations, cela devrait au moins distraire un cercle restreint d’initiés, à tout le moins le rédacteur lui-même…
La profondeur de la réflexion est à la hauteur, si j’ose dire, de l’ambition à décrypter la nature humaine.
Aucun risque donc de se noyer !
Commençons par les généralités :
L’étymon le plus populaire pour « travail » est le mot latin « tripalium », évoquant la souffrance générée par un instrument de torture.
Le parallèle est évocateur mais semble-t-il trop récent pour être crédible, les linguistes ne notant l’apparition de cette métaphore qu’au 20ième siècle.
Quelles qu’en soient les origines, il y a toujours une part de peine dans l’acception du mot travail.
Donner plus de sens personnel à son travail est une aspiration naturelle, et bénéfique, mais il restera toujours une part ingrate ou tout du moins laborieuse même quand la satisfaction personnelle ou le bénéfice du résultat sont directs.
La question est donc :
Hors de tout masochisme , quel équilibre acceptons nous entre effort et récompense ?
C’est une question personnelle et encore compliquée par le caractère matériel, physique, ou immatériel, intellectuel, de l’un ou de l’autre.
Vous avez je suppose remis quelques glaçons dans votre breuvage préféré pour éviter la surchauffe, soyez rassurés on en vient au concret, du moins à un évident nombrilisme qui rapproche l’apogée de la réflexion du centre de gravité de l’auteur, ce qui limite les risques de chute de cette mise en abyme.
Ainsi donc, libéré du « travail abstrait » en vertu de conséquentes contributions pendant ma vie professionnelle, je peux me consacrer à un travail personnel dont le bénéfice et le sens ne font à mes yeux aucun doute.
La part de « réparation / maintenance » est certes contrainte, et à bord d’un voilier autour du monde elle est loin d’être anecdotique, mais le résultat apporte directement satisfaction matérielle (quand ça remarche ! ) et intellectuelle (celle d’avoir vaincu l’adversité).
Au delà des tâches vitales ou même seulement nécessaires, je travaille :
La guitare, qui si j’en souffre peu, hormis des oreilles, ne me gratifie malheureusement pas d’une joie extatique, le rendement des travaux étant assez lamentable.
Je travaille aussi assidûment le wingfoil.
Je ne ménage pas mes efforts, y consacrant dès l’aube de nombreuses heures, en combiné sportif mi-natation mi-aérien.
Les progrès millimétriques encouragent néanmoins la persévérance que l’obstination opiniâtre dispense opportunément de flagrante réussite.
Pour les travaux matinaux, il faut dire que je dors au bureau, ça facilite la mise en route et réduit drastiquement le temps de transport.
A réduire la peine on améliore le ratio satisfactions/efforts.
Et puis il fait beau et chaud…
Je travaille aussi les langues étrangères des contrées que je fréquente.
Je reconnais néanmoins que lorsque que j’ai enfin péniblement dépassé le stade de l’ânonnement, j’ai déjà changé d’aire linguistique.
La prochaine est grande, certes, c’est le Brésil, mais pour avoir entendu parler les autochtones je suis saisi d’un doute aussi vaste que ce pays continent.
Écartons les mots croisés, c’est un jeu, quant à la lecture je ne persévère que si j’y trouve plaisir ou intérêt.
Enfin, et cela me demande énormément de volonté, je travaille mon « lâcher- prise ».
Très peu de progrès mais finalement pas trop de souffrances.
Si vous avez vous même soutenu l’effort de lecture jusqu’ici, expérimentant intimement les principes sus-cités, voilà enfin venu le temps de la modeste récompense : le soulagement d’en avoir fini.
Amicales félicitations…


Travail en hauteur
Le risque (de chute) n’est pas exempt du labeur. Quelques endomorphines et un paquet d’adrénaline minorent aussi la souffrance.

Petole et sargasses
Une preuve d’aliénation au travail :
Pétole pluvieuse et sargasses engendrent une dysphorie consécutive à l’impossibilité de travailler le wingfoil.
« travailler c’est la santé …. » très vieux tube (1965) mais parfaitement d’actualité d’Henri Salvador … à écouter quand il pleut …et avec modération.