Cap au Sud !
Objectif Brésil
Caréner Loargann, refaire les dents du capitaine, maîtriser l’empannage en wing foil …
Voilà trois conditions qu’il fallait remplir pour reprendre la route.
La saison cyclonique approche, il est temps de « faire du sud » et dans 6 mois il faudra être en Patagonie.
Les deux premières étapes sont déjà bien connues :
Quitter la Guadeloupe pour Marie-Galante, puis cingler vers la Martinique en longeant la magnifique côte au vent de la Dominique. Normalement, une formalité.
Passons sur l’anémomètre/girouette changé à grand frais il y a 5 mois et qui deux jours avant le départ refuse d’aller plus loin !
Un nouveau tour en boutique, une ascension en tête de mât pour faire l’échange et l’incident est clos.
A l’heure prévue, Mardi 13 mai, à la mi-journée, Loargann quitte la marina de Pointe-à-Pitre, chargé comme un Galion, les stocks de provisions de bouche prévus pour aller jusqu’au Brésil !
Un bon 30 à 35 nœuds de vent et une mer bien formée, au près, nous remettent vite dans le bain.
Loargann avance vaillamment sous voilure réduite, un ris dans la grand-voile, et avec la petite voile d’avant, la trinquette, quand un déchirement sourd accompagne un affaissement de cette dernière, qu’il faut rouler en catastrophe.
Voilà un départ en fanfare !
Il faudra monter au mât pour attraper la drisse, manœuvre qui tend la voile vers le haut.
Comme je suis de nouveau en solitaire, l’ascension va être laborieuse, il vaut mieux être au calme !
Une « molle » de vent inattendue devant la Dominique nous fait perdre une heure, le mouillage se fera donc à la tombée de la nuit.
Je choisis en conséquence un lieu abrité pour les réparations et déjà connu pour éviter les mauvaises surprises.
Il fait déjà nuit noire quand l’ancre descend dans l’Anse du Galion.
Une bonne nuit de repos m’a donné de l’énergie et ce jeudi matin je suis prêt pour l’opération « Monkey » : ascension au mât, couture et remise en place !
Avant même le petit-déjeuner, je fais un tour « du chantier » sur le pont et, par réflexe, je manœuvre la barre en passant.
Bizarre, elle est plus dure que d’habitude . Diantre !
Un coup d’œil à l’arrière révèle l’origine de la déréliction : un filin est pris dans un des safrans !
Les emm… volent en escadrilles à ce que l’on dit.
Bon un petit bain dans une eau à 27 degrés, même le matin, pas de quoi s’offusquer.
L’eau est assez trouble, le filin est coincé, mais se libère après quelques manœuvres. On va pouvoir passer aux activités aériennes …
Sauf que le filin résiste, le bougre: il s’est aussi amouraché du deuxième safran .
« Pas de lézard mon gaillard », une petite contrariété supplémentaire, rien de bien méchant.
En une apnée voila le safran libéré…
Sauf que le filin résiste, le bougre: il s’est aussi entiché de l’hélice !
Dans le noir hier soir, je n’ai rien vu, heureusement que c’était sur la fin de parcours !
Il faudra quand même 4 ou 5 apnées pour libérer l’hélice.
Sauf que le filin résiste, le bougre: il s’est aussi épris de la quille !
Le vicieux, formant une boucle en lasso, s’est pris dans le bulbe !
Je ne suis pas un fervent pratiquant subaquatique mais là j’étais un peu énervé par ce harcèlement inconvenant.
Alors armé du couteau de plongée, de taille et d’estoc vengeurs, je pourfends l’impudent jusqu’à sa reddition sans condition.
J’ai l’impression d’être soumis à l’ordalie !
La première épreuve est accomplie, la deuxième, cette fois ci dans les airs, m’attend.
Il me faut bien 15 minutes pour me hisser à 15 mètres de haut, pour attraper la drisse qui me nargue nonchalamment.
L’orage déclenchant rafales et averses, à chaque oscillation un peu forte je serre le mât entre mes jambes et j’attends que ça passe.
Je finis par saisir la drisse et rejoindre le pont.
Il n’y a plus qu’à recoudre la voile.
C’est l’endroit le plus épais de la voile.
Il va il y avoir du sport pour recoudre cela à la main !
Enfin, au soir, la voile est réparée !
On va pouvoir reprendre la quête du Graal.
Demain : Ile de Sainte Lucie
Sainte Lucie n’a pas très bonne réputation sur le site des Affaires Étrangères du gouvernement Français pour cause d’insécurité croissante.
Rien ne transparaît dans la marina qui respire presque l’opulence. En tout cas les villas alentours et les loueurs de bateaux n’inspirent pas la commisération.
Cap ensuite sur Saint-vincent à la végétation luxuriante et au relief exubérant,
Quand on arrive par le Nord, on s’arrête naturellement dans la baie de Chateaubelair.
A peine arrivé une nuée de marchands anadyomènes surgit.
Juchés sur des épaves de paddle chacun tente de vendre aux bateaux de passage qui un poisson, d’autres des fruits qu’ils tiennent précieusement dans un pot qui leur sert de siège. A la force des pagaies, c’est une véritable régate qui s’engage pour gagner la première place !
Je fais honneur au premier en lui prenant un poisson. Demain on prendra des fruits.
Vient ensuite Bequia, un mouillage très fréquenté, un petit port sympa, mais pas grand chose à voir, on y passe donc juste une nuit réparatrice.
Ce qui m’attire ce sont les Tobago Cays
C’est l’Attraction des Grenadines, les catamarans de charter y sont légion mais le lagon derrière le Horse Shoe Reef, exposé au vent, attire moins les plaisanciers avides de mer calme, de sable blanc, d’eau turquoise et de soleil.
C’est tout simplement sublimement turquoise quoiqu’un peu exposé !
Le lieu est idéal pour le wing et le kite surf dont les sessions s’enchainent.
Une bonne déchirure du kite et une fuite sur l’annexe gonflable sont les seules contrariétés.
Je laisse passer la nuit en me consolant en lisant les aventures de Yann QUENET « Le tour du monde avec mon Baluchon » .
Cela réconforte de voir comment ses propres mésaventures techniques glissent sur son optimisme, son humour et sa détermination.
Au petit matin je tente de colmater la fuite mais au final elle est juste ralentie.
Le 27 mai, cap sur Cariacou à moins de 20 Milles des Tobago Cays.
Dès 9h je suis prêt à aller à terre demander la clearance, le droit d’entrer dans les eaux nationales.
J’ai deux heures devant moi avant que l’annexe se dégonfle de trop.
Super confiant j’entre dans le local « Custom and Immigration ».
L’acceuil est glacial .
Ca c’est habituel on dérange toujours le pauvre fonctionnaire qui lui n’est pas en vacance !
Je donne la référence de ma déclaration sur internet, normalement ils ont juste à imprimer et à tamponner.
Mais crime de lèse majesté j’ai confondu Grenada (état de Grenade) avec Grenadine (état de Saint-Vincent et les Grenadines d’où je viens à moins de 20 milles de là).
L’immigration officer me dit que je dois 30000$ pour entrée illégale (je suis venu directement le voir à mon arrivée !), et que j’ai laissé le bateau trop loin du port (encore jonché d’épaves après Beryl), à un demi-mille.
Il me dit que j’ai gravement offensé la loi !
S’ensuit un bon quart-d’heure de quiproquo, mon anglais étant rapidement dépassé devant un préposé au débit mitraillant.
Je me lève et propose de repartir aussitôt.
Il me menace de me jeter en prison.
Bigre, je venais de lire sur les blogs que la douane à Cariacou était sympathique !
J’ai dû entrer par erreur en Absurdie.
Plus je tente de régler le problème à l’amiable plus le ton monte.
J’ai face à moi le parangon de l’atrabilaire.
Dans ce cas : méthode « tortue » :
Je demande à joindre l’ambassade, je me tais, je tourne en rond dans le fond du bureau.
Au bout de dix bonnes minutes il me rend mon passeport, la pause méridienne approchant il craint sans doute quelques retards, et m’ordonne alors de quitter le territoire immédiatement.
Je ne demande pas mon reste.
Je file aussi vite que possible vers l’annexe … qu’évidemment je trouve dégonflée après trois heures au soleil.
Et c’est au risque de couler que je rejoins Loargann.
Le temps d’échafauder une nouvelle route, de vérifier que tout est OK , de retirer péniblement le moteur de l’annexe qui se prend pour une guimauve, de casser la croûte et de faire un petit roupillon, voila mon fonctionnaire qui arrive sur la vedette des Coast Guards !
« I asked you to leave Immediatly » éructe-il !
Je propose de lever l’ancre dans la minute, je suis à présent prêt.
Mais je suppose qu’il me prend pour un dangereux terroriste.
Je ne sais pas ce qu’il a raconté aux Coast Guards mais ceux-ci, un peu ahuris quand même, entreprennent de fouiller le bateau.
J’ouvre les coffres, indique où est le papier hygiénique (même dans l’épreuve il faut garder un poil d’humour !) … bref tous les endroits suspects.
Rien d’illégal.
Mince, un touriste !
Les Coast Guards ont l’air bien embêtés.
Alors le fonctionnaire que je crois avoir convaincu de ma bonne foi…
décide de me retirer mon passeport et encore une fois me menace de prison !
Je lui indique que je serai donc à son bureau dès l’ouverture, avec une nouvelle demande de clearance, cette fois correcte.
Le lendemain matin confondu d’excuses, un brin obséquieux je l’avoue, j’implore sa clémence et la clearance.
Mais le quiproquo semble reprendre, j’attends alors dehors que les choses se décantent.
Au bout de deux heures l’immigration comme la douane m’indiquent que les Autorités ont été contactées.
Ce coup-ci, j’ai le numéro de l’ambassade dans le poche.
Je demande juste à mettre le bateau en sécurité avant d’être jeté en prison !
On me tend alors une liasse de papier, sans doute ma mise sous écrous !
Mais …
ça ressemble à une clearance !!!
La douanière me dit que je n’ai pas été « pleasant » (sic) mais que si je paye la taxe d’entrée, tout à fait officielle, c’est Ok .
Je n’en reviens pas , je sentais déjà les fers autour de mes membres !
L’irascible me tend alors mon passeport qu’il a tamponné rageusement.
Je signe les papiers et cours aussi vite que possible vers la liberté.
Dans mon dos le gabelou vocifère toujours.
Je suppose qu’il s’est fait copieusement engueuler par son chef pour avoir découragé un touriste de venir dépenser ses dollars sur cette île meurtrie par le cyclone Beryl.
La journée est bien entamée mais une bonne brise me pousse vers Grenade où je suis accueilli comme un prince à la Marina de Port-Louis.
Le temps de passer la Pentecôte au calme, de ravitailler, de réparer l’annexe,le dessalinisateur qui fuit, l’hydrogénérateur qui a subi les chocs des paquets de sargasses, la voile de kite …..et cap au sud, vers le Bresil !

Départ de Guadeloupe
Sous-titre
Bonne brise ! 30 à 35 Noeuds … qui finissent par faire céder la trinquette !

La têtière de la trinquette
Déchirée
Grimpette au mât et couture au programme !
La têtière du génois va faire pareil 15 jours plus tard entre Grenade et Trinidad avec re-grimpette au mât et couture.

Pêche pas vraiment miraculeuse
un filin de casier dans l'hélice
Premier bain avant 7 heures du matin !!
Mais l’eau est à 27°C.
J’espère éviter cela en Patagonie !

Saint-Vincent et les Grenadines
Arrivée par le Nord
Végétation luxuriante , relief abrupte, population sympathique, même les douaniers ! Ambiance cool.

Le vainqueur de la "régate"
Chateaubelair
Préparation du poisson.

Poisson frais
Plus fort que Uber Eats !
Livré et découpé au sortir de l’eau.
Ambiance Asie
… à Saint Vincent .
Gréément jonque pour cette goélette des années 60.
Bon , ils vont arriver une demi-journée après moi à Bequia à 30 milles de là .


Bequia
Le port

Tobago Cays
Grenadines
Le spot . Un peu clapoteux pour le wing , pas mal de courant, mais tellement turquoise !

Tobago Cays
Loargann au mouillage
Un peu exposé… mais c’est ce que l’on veut pour le wing !

Grenade dans le sillage
Objectif Bresil
Bonne brise , bonne vitesse.
Dans 1 heure la têtière du génois va lâcher :
Arrêt nécessaire à Trinidad et Tobago pour la réparation après une nuit et une journée à lutter contre vent et courants sous voilure réduite…